Vide, vide, vide.

J'ai rêvé, j'ai cru et j'ai eu la naïveté de penser que peut-être moi aussi un jour je pourrais trouver ma voie, seulement non, c'était trop facile, il fallait me faire attendre, trépigner, il fallait que j'en chie, que je me heurte à la réalité, que je réalise que non, c'était pas fait pour moi, qu'il faudrait que je trouve une alternative, une autre encore, parce que non, décidément, à elle on peut pas lui faciliter la vie.

Alors je recommence, parce qu'il faut bien, quand même, parce que je suis apparemment une fille intelligente et que ça serait dommage de me gâcher, que je peux faire des études, et même - tu pourrais briller si tu voulais. Je sais pas alors si c'est parce que je veux pas ou juste que je suis peut-être intelligente, mais peut-être pas faite pour les études, ça t'es pas venu à l'esprit ça, hein, que je sois une marginale, une originale, une rebelle, une vraie.

Bah t'as bien raison, c'est des conneries.

Je sais que d'autres avant moi en ont chié, que je suis pas la première et encore moins la dernière, mais je m'en fous, ça me parle pas, les autres, je m'en fous de savoir que je suis pas la seule, je veux juste pas être comme ça. Me sortir de là, ce putain de cercle vicieux, que le serpent arrête de bouffer sa putain de queue, je veux avancer, être major de promo, trouver un boulot, vivre enfin une vie à peu près normalen mais c'est pas possible parce que je sais pas bosser, je sais plus, je stresse plus, même quand on approche de l'échéance.

Mais quelque part, je sais pourquoi, c'est parce qu'au fond, je suis vide, vide, vide, vide, creuse et désespérément vide, putain tu comprends ça? vide, je suis béante, tu m'ouvres en deux, je saigne pas, je suis vide, tu pourras me regarder au travers, je suis vide, vide et c'est pas près de changer, vide et je sais pas quoi faire pour combler ce putain de vide qui me bouffe et me ronge petit à petit mais inexorablement.

Peut-être que je vais totalement disparaître, m'effacer, happée par le vide, le néant, ça sera mon histoire sans fin, je serai là pour l'éternité, vide et invisible, et je regarderai crever les gens que j'aime un à un, ils seront arrachés à moi sans que je puisse rien faire, rien du tout, parce que je suis conne et faible et j'ose pas dire quand j'aime vraiment, alors je me fais mal et peut-être qu'au fond, c'est juste une histoire d'amour qui aura mal tourné, et que peut-être, ouais, peut-être bien que c'est bien fait pour moi.

T'avais qu'à ouvrir ta gueule, connasse.

[Ca ferait mal pareil, pourtant.]